samedi, novembre 01, 2008

Match amical France - Allemagne!

Si proche et si méconnu en France, le vignoble allemand s'étend sur près de 100,000 ha (pour comparaison l'Alsace fait environ 15,000 ha et Bordeaux 120,000 ha) et connait une recrudescence qualitative depuis le début des années 1990.

Tout comme son proche voisin l'Alsace, l'Allemagne sait produire des vins de terroir inimitables, pouvant parfois atteindre des sommets avec les plus grands trockenbeerenauslese (l'équivalent de nos Sélection de Grains Nobles). Environ 20% du vignoble est planté avec le roi des cépages, le Riesling.

Sur une idée originale de Jean-Luc Lanoix (Vins & Terroirs à Haguenau), nous avons joué 6 matches amicaux entre nos deux pays viticoles. Tous les vins ont été dégustés par paires à l'aveugle. Compte-rendu d'après match:

Match 1:
Spätburgunder trocken 2005 - Keller 36€

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Pinot Noir Cuvée "V" 2006 - René Muré 24€

  • Le Pinot Noir allemand offre un beau fruit (cassis) assez démonstratif avec une pointe d'alcool. La bouche est assez ronde et fruitée, un peu passe partout ne serait ce pour la finale alcooleuse qui dérange un peu. Moyen
  • La version alsacienne possède un nez fumé, marqué par le boisé. La bouche déçoit par sa fluidité et le manque évident de matière. Une acidité excessive fait planer le doute de la maturité des raisins à la récolte. On se demande vraiment pourquoi ce vin a été passé dans le bois. Raté
Allemagne: 1 -- France: 0


Match 2:
Riesling Clos des Frères 2004- E. Loew 9.60€
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Riesling Trocken 2004 - Wittmann (Rheinessen) 14€


  • Le riesling alsacien est très ouvert au nez avec de belles notes d'agrumes (pamplemousse, citron). L'attaque est perlante et déroule une belle acidité pleine et mûre qui lui donne une bonne longueur sur les agrumes. On ne regrettera seulement que le creux en milieu de bouche. Bien
  • La version outre-rhénane est plus fermée, voire réduite avec des notes pétrolées. La bouche est aussi perlante, mais pas totalement sèche cette fois et offre une large salivation en largeur, typée acide malique (maturité?). La finale manque de netteté. Moyen
Allemagne: 1 -- France: 1


Match 3:
Weissburgunder 2001 - Weingut Ö. Rebholz 28€

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Nuits St Georges Blanc La Perrière 2003 - H. Gouges 52€



Confrontation intéressante de deux pinots blancs. En effet, la parcelle du domaine Gouges est planté en pinot noir qui a au fil des années muté en pinot blanc. C'est donc un cépage unique, propre au domaine.
  • Le weissburgunder est réduit (notes d'humide, café) puis offre des notes lactées à l'aération (malo?) et de litchi. La bouche est destructurée au possible: sucres résiduels, bouche plate, finale amère et alcooleuse. Un vin brouillon à oublier. Moyen-
  • Le Gouges est typé bourogne au nez avec de belles notes grillées et une certaine part de mystère. La bouche se dévoile progressivement. De prime abord, elle se présente sur une attaque lache mais très vite offre un crescendo de matière, sans toutefois faire oublier l'élevage. A garder en espérant que le boisé soit digéré (le prix de cette bouteille me choque tout de même). Moyen+
Allemagne: 1 -- France: 2


Match 4:
Riesling Grand Cru Hengst 2003 - Josmeyer 30€

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Riesling Trocken Bubackert 2003 - Keller 43€


  • Le Hengst a besoin d'aération pour s'affiner et dévoilé son potentiel avec des belles notes d'agrumes. La bouche n'est malheureusement pas sèche (effet millésime pou un vin titrant 12.5%?) et le niveau moyen d'acidité peine à apporter de la fraicheur salvatrice. Bonne longueur. Moyen+
  • Le Bubackert est ouvert et portée par des effluves d'alcool (vin titrant 13.5%). D'attaque franchement perlante, le vin déroule une belle acidité longue et mûre. Notes d'agrumes simples mais belle finale nette sur la minéralite. Bien
Allemagne: 2 -- France: 2


Match 5:
Riesling Auslese 2003 - Wittmann 23€
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Riesling SGN Nature 2000 - J. Meyer 37€


  • La version allemande avec ses 8% d'alcool acquis n'a pas connu le botrytis. Le nez (sur des notes fraiches de pamplemousse) ne laisse en rien présager la bouche type SGN: onctuosité des sucres et bon relai acide qui contrebalance les quelques 200 g/l de sucres résiduels. Belle finale saline. Bien
  • Un vin botrytisé qui titre 13% Le nez explose sur des notes monothématiques de coing surmûri, limite écoeurant. La bouche est sans surprise avec une domination absolue des sucres résiduels (là aussi environ 200 g/l) où l'acidité peine à pointer le bout de sa langue. La finale est quant à elle un peu fatiguée sur des notes de caramel cuit. Ce vin atteste de la progression du domaine depuis. Moyen
Allemagne: 3 -- France: 2

Match 6:
Monbazillac Excellence 2001 - Château des Tours des Verdots 85€ (50cl)
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Riesling Trockenbeerenauslese 2006 - Keller 70€ (37.5cl)


  • Le Monbazillac est marquée par la volatile au nez (colle scotch) et semble fatigué. Confirmation en bouche avec des notes de caramel brûlé, peu d'acidité pour éviter une finale courte et assez lourde. Les 220 g/l de S.R. ne passent pas et le verre ne se vide pas. Moyen
  • On atteint par contre des sommets avec le vin allemand. Dès le nez, le vin fait la différence. Quelle fraicheur avec des notes complexes d'agrumes et de raisins frais. On salive rien que de le sentir! En bouche, c'est l'extase! Une onctuosité (sucres et surtout gras) nous tapisse agréablement toute la bouche avec un relai acide parfait qui nous offre une finale lunghissima de sapidité. Un moment magique d'un vin qui impréssione d'avoir trouvé son équilibre avec 7.5% d'alcool acquis et près de 250 g/l de S.R. Grand
Allemagne: 4 -- France: 2


Conclusion: Score sans appel. Le potentiel des vins allemands n'est plus à démonter. On atteint même des sommets de plénitude et de frisson comme sur le dernier vin. Celà redonne envie de renouveller cette expérience de dégustation, en essayant peut être de coller des matchs sur le même millésime et si possible sur des terroirs similaires. En tout cas, pour l'heure vous saurez où passer vos prochaines vacances viticoles...