samedi, avril 23, 2011

Visite au domaine des Cailloutis (Gaillac)

Changement de décor pour la visite phare de notre séjour dans le gaillacois. Bienvenu chez Patricia et Bernard Fabre du domaine des Cailloutis.

Perché en haut d’une colline magnifique, au bout d’une route sillonnant à travers de vieilles maisons en pierre, on débarque au domaine « entre ciel et terre » avec un horizon dégagé à 360. Très vite, on sent que l’on va passer un bon moment dans cet endroit qui rayonne d’ondes positives…

Accueillis par Patricia et son magnifique chapeau, nous allons petit à petit rentrer dans le monde de la biodynamie et de Nature et Progrès. Ici on n’applique pas les préceptes à lettre de M. Steiner, mais au contraire on expérimente. Les préparations de prêle et d’ortie ne sont pas dynamisées. Il se base sur un diagnostic kinésiologique pour établir les éventuels déséquilibres énergétiques de la plante. Ils font alors appel à des élixirs floraux comme remède.

Au début, on est tous un peu timide et la dégustation est plutôt studieuse. Mais assez vite, Patricia dégaine de très beaux sourires, ses yeux pétillent et on se sent presque comme à la maison. On parle de vin bien sûr, mais on embraye rapidement sur la viticulture, l’écologie, les cueillettes sauvages.

Loin de tout concept marketing, on entre dans le monde noble des travailleurs de la terre. On fait connaissance avec une famille qui cherche à minimiser son empreinte écologique sur l’environnement. Nous aurons ainsi le droit à la visite des toilettes « sèches » et des bassins naturels à base de végétaux pour purifier les eaux usées.

Même si on ne voit pas toujours les elfes et les gnomes en question, on se prend au jeu et on s’ouvre volontiers à une autre approche du vivant, plus instinctive et expérimentale. Car le plus important est bien là : les résultats se font bel et bien (res)sentir dans les vins. Chaque cuvée a sa personnalité. On goûte une sève vivante et vibrante, toujours très pure. En somme, des vins sans maquillage, aux prix d’une modestie incroyable tout à l’image de leurs nobles géniteurs. Une chose est sûre, on reviendra se ressourcer ici et regoûter à ce petit Eden hors du temps, hors de la globalisation galopante. On repart d’ici pas tout à fait dans l’état où nous sommes arrivés. Signe qui ne trompe pas…


Les vins

Gaillac « Orchidée » Blanc 2008 – 4.50€
Un blanc sec éclatant de fleurs et de fruits. Un vrai régal pour l’apéro en terrasse dans un jardin ombragé sous un cerisier (on dirait du vécu, ça !). Le vin gagne de la finesse et pureté aromatique avec l’aération. Très Bien

Gaillac « Prestige » Blanc 2009 – 6.50€
Passage en barrique et léger bâtonnage. En résulte un vin plus épicé et avec un beau gras qui tapisse la fin de bouche. Rien à voir avec un maquillage vulgaire. Ici l’élevage apporte une vraie personnalité. Bien

Gaillac Rouge 2009 – 5€
Ma cuvée gourmande préférée du domaine. Touche d’originalité cette année, la Syrah participe pour la première fois à cette cuvée (à hauteur de 20%). Du coup, en plus du cocktail habituel de fruits rouges et frais, on y retrouve des notes de violette et de poivre. Le tout dans un équilibre irréprochable, gouleyantissime ! C’est le genre de bouteille qui s’évapore comme par miracle. Testé et approuvé sur des gariguettes au dessert. Un régal de simplicité et de justesse. Très Bien

Gaillac « Prestige » Rouge 2007 – 8€
Là aussi prestige signifie élevage bois (12 mois) qui apporte densité et velouté. Le supplément de mâche appelle quelques protéines mais là encore on ne perd jamais de vue la buvabilité sacrée du domaine. Bien

Gaillac Blanc Doux 2008 – 5€
Les vins moelleux de qualité les moins chers de la planète ! On prend un grand snif de coing au nez et en bouche la magie de la salivation longiligne opère. La grande classe ! Très Bien

Gaillac Blanc Liquoreux « Cœur d’or » 2008 – 10€ (50 cl)
Wow ! Chapeau bas. Ce vin réconcilie quiconque avec les liquoreux. Loin de vous coller la bouche par des sucres surabondants, on découvre une véritable sève fraîche bercée de zeste d’agrumes (oranges…) à la finale interminable. Pas de doute, les elfes y sont pour quelques choses ! Très Bien

Domaine des Cailloutis

Patricia et Bernard Fabre
81140 Andillac
Tel/Fax 05 63 33 97 63

Visite au domaine de la Ramaye (Michel Issaly) à Gaillac

Le domaine

Accueilli amicalement par Michel Issaly, nous allons faire en une heure le tour des vins du domaine. Michel, qui est entre autres président des Vignerons Indépendants, est dans une phase de décroissance.

Le domaine est passé de 15 à 5 hectares et il envisage de le réduire à 2 ha dans quelques années. Il veut une exploutation à taille humaine pour faire des vins haute couture / de garage ? Ses activités annexes lui empêchent encore aujourd’hui d’être vigneron à plein temps et d’apporter tous les soins nécessaires à ses vignes. Du coup, il se voit dans l’obligation d’employer deux produits systémiques (des « saloperies » comme il l’avoue volontiers) pour palier aux attaques parasitaires.

On apprécie chez Michel sa démarche de défense des cépages locaux (prunelard, braucol, et duras en rouge ; mauzac, len de l’el et oundenc en blanc) ainsi que son honnêteté. Si les vins manquent aujourd’hui à mon sens un peu d’âme, il faudra les suivre dans ses prochaines années… Ses prix détonnent un peu aussi au regard de l’appellation et de leur qualité.

Les vins

Gaillac premières côtes « Les Cavaillès Bas » Blanc 2008 – 12€
70% mauzac, 20% len de l’el et 10% de oundenc
Un vin blanc sec d’apéro, peu expressif et qui mériterait un carafage pour être plus causant. Moyen

Gaillac « La Combe d’Avès » Rouge 2007 – 15€
50% duras, 50% braucol
Un beau vinj de fruits rouges croquants à boire entre copains. La finale est fraîche et gouleyante. Bien



Gaillac « La Combe d’Avès » Rouge 2006 – 15€
50% duras, 50% braucol
On prend les mêmes mais on ne recommence pas ! En effet, l’élevage sous bois encore effectué cette année là ne passe pas. On perd la magie du fruit au détriment d’un boisé toujours pas intégré. J’ai du mal à comprendre ce choix d’élevage sur ce type de vin. Très Moyen

Gaillac « Le Grand Tertre » Rouge 2009 – 25€
90% prunelard, 10% braucol
L’intérêt de cette cuvée est de nous faire découvrir le prunelard. Un cépage qui donne de la mâche et de la sucrosité. Sensations proches du grenache, voire de l’humagne rouge du Valais suisse. Par contre, on ressent fortement l’effet millésime avec un excès du couple alcool / sucrosité. Le genre de vin où on a du mal à finir la bouteille. Moyen

Gaillac « Le Braucol » Rouge 2009 – 45€
100% braucol
La cuvée star (par le prix !) du domaine. Elevage ambitieux dans des fûts neufs issus de chênes de la région. Un vin malheureusement body buildé, voire parkerisé que je ne comprends pas. Allez laissons lui le temps de s’assagir et regoûtons le dans 10 ans. A regoûter.

Gaillac « Le Vin de l’Oubli » Blanc 1999 – 30€ (50 cl)
100% mauzac
Un vin de voile, typé vin jaune. Profil classique oxydatif sur des notes de noix. Belle tension. A deguster sur un beau comté 24 mois. Bien

Domaine de la Ramaye
Michel Issaly
Sainte Cécile d’Avès
81600 Gaillac
www.michelissaly.com

samedi, avril 16, 2011

Mes mots du vin...

Je vous conseille très vivement la lecture du supplément du numéro 100 du "Le Rouge & Le Blanc". Dans une démarche intime et touchante, les dégustateurs du R&B parlent chacun à leur tour d'une voix personnelle de leur vision du grand vin.

Un fois de plus Frank Sauvey (lire aussi ici) offre une vision du vin qui me parle beaucoup. Extrait: "La sensation d'énergie n'est pas 'séduisante', pas 'agréable', elle est frappante. C'est un choc émotionnel, réjouissant par sa dynamique, sa vitalité. (...) Les grands vins vivants ont cela en commun: ils nous emmènent par l'évidence de leur présence, qu'elle soit faite d'énergie ou d'autre chose."

Des moments rares de partage qui donnent envie de (re)formuler sa vision personnelle du grand vin authentique et vivant. Timide essai de mettre des mots, mes mots, sur ce qui touche à la partie la plus intangible et immatérielle de la dégustation: l'émotion.

J'ai déjà évoqué ici l'importance de la transparence. J'aurais envie aujourd'hui d'insister sur l'importance du toucher dans ma façon de déguster.

Au fil du temps je m'éloigne de l'idée d'une quête (trop souvent compétitive) d'une liste (la plus longue possible) d'arômes pour aller à l'essentiel: vider sa tête et se recueillir devant les sensations tactiles et vibratoires de notre langue, de notre bouche toute entière. Rempli par la sève d'un vin vivant, le silence s'impose tout naturellement. Notre corps frissonne face à ce ballet d'ondes inconnues et pourtant si familières. Le grand vin s'entrevoit par petites touches, des petites tâches de lumière évanescentes mais si inoubliables.